Comment le conditionnement opérant façonne notre présence sur les réseaux sociaux

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Le behaviorisme, fondé par John B. Watson au début du 19e siècle et développé par des chercheurs tels que B.F. Skinner, est une approche de la psychologie qui se concentre sur l’observation et l’analyse des comportements (comportements mesurables) en réponse à des stimuli externes.
Le courant Béhavioriste ne s’intéresse pas (peu) à la dimension cognitive (la boite noire, le cerveau) mais observe les comportements.
En d’autre terme, le courant béhavioriste ne cherche pas à révéler les mécanismes de notre cerveau mais se concentre sur les comportements observables.

Le modèle de base est assez simple, il s’agit du modèle S -> R (Stimuli -> Comportement)
Les expériences de Pavlov sur la salivation des chiens en réponse à une cloche (conditionnement répondant) ont été enrichies par les travaux de Skinner sur le renforcement mettant en avant le conditionnement opérant.

Analyse des comportements sur les réseaux sociaux sous l’angle du Béhaviorisme

Sous l’angle du béhaviorisme, les interactions sur les réseaux sociaux comme les « likes » et les « commentaires » peuvent être analysées en termes de renforcements et de comportements.
Pour bien comprendre il faut transposer la boite de Skinner (avec le rat) à une boite qui serait le réseaux social dans lequel il existe des stimulus et des comportements. Je ne pas dit que vous êtes un rat, je dis simplement que « la boite de Skinner » permet de vérifier de façon expérimentale les hypothèses. Toutefois nous pouvons comparer l’environnement Facebook à une « boite à Skinner ».

Dans cet article je vais rapidement vous remémorer les quatre conditions expérimentales des boites à Skinner. Ces expériences ont été menées dans le cadre de l’apprentissage. Je précise également que lors des expérimentations, lorsque le rat reçoit un choc électrique il s’agit d’un stimuli « aversif » (désagréable) équivalent à la sensation d’une décharge d’une pile électrique sur la langue.

  • Le renforcement positif (=>ajout (+) d’un stimulus agréable)
  • Le renforcement négatif (=> retrait (-) d’un stimulus désagréable)

Les conditions expérimentales de renforcement positif et négatif visent à renforcer (apprendre) un comportement.

  • La punition positive (=>ajout (+) d’un stimulus désagréable)
  • La punition négative (=>retrait (-) d’un stimulus agréable)

Les conditions expérimentales de la punition positive et négative visent à désapprendre un comportement.

Le « Like »

  1. Comportement : Publier du contenu (photo, statut, vidéo, etc.)
  2. Renforcement : Recevoir un « like » (=>ajout (+) d’un stimulus agréable)

Analyse béhavioriste : Le « like » agit comme un renforcement positif (cela lui procure une sensation agréable ou une validation).
Lorsqu’une personne publie du contenu et reçoit un « like », cela renforce son comportement à publier et re-publier… like… publier… like… publier.
Plus la personne reçoit de « likes », plus elle est susceptible de continuer à publier du contenu.
L’incertitude de recevoir un « like » (renforcement variable, c’est une variante des expérimentations de Skinner) peut également augmenter la fréquence de vérification des notifications, (et donc de connexion, présence sur les Réseaux sociaux) car le renforcement variable est particulièrement puissant pour maintenir un comportement.

Le « Commentaire »

  1. Comportement : Publier du contenu
  2. Renforcement : Recevoir un commentaire  (=>ajout (+) d’un stimulus agréable)

Analyse béhavioriste : Tout comme le « like », le commentaire agit comme un renforcement, mais il est souvent perçu comme plus significatif car il nécessite plus d’effort et d’engagement de la part de l’autre utilisateur.
Un commentaire positif peut renforcer davantage le comportement de publication qu’un simple « like ». Cependant, un commentaire négatif peut agir comme une punition (au sens du Béhaviorisme), ce qui pourrait diminuer le comportement de publication.

Dans le cadre du béhaviorisme et du conditionnement opérant, le « like » et le « commentaire » agissent donc comme des renforcements positifs qui encouragent (ou renforcent) le comportement de publier du contenu sur les réseaux sociaux. Ainsi la boucle… est bouclée !

En résumé, ces interactions (likes et commentaires) créent un cycle de renforcement où l’utilisateur est encouragé à publier davantage de contenu en anticipant une réaction positive de la part de la communauté.
Les plateformes de médias sociaux, conscientes de ces dynamiques, sont conçues pour mettre en avant et notifier ces interactions, exploitant ainsi les principes du conditionnement opérant pour maximiser l’engagement des utilisateurs.

 

Peut on dire que ce qui nous fait nous connecter sur les réseaux sociaux est lié à « l’incertitude » d’obtenir un like ?

Cette idée est soutenue par des théories de la psychologie comportementale et de la neurobiologie.

Un comportement qui est renforcé (c’est-à-dire récompensé) a tendance à être répété. Dans le contexte des réseaux sociaux, recevoir un « like » (ou tout autre type de validation sociale, comme un commentaire ou un partage) agit comme un renforçateur nous venons de le voir ci-dessus). Cela procure une sensation agréable, souvent décrite comme une petite « dose » de dopamine, un neurotransmetteur associé au plaisir et à la récompense.

Mais ce qui rend les réseaux sociaux particulièrement addictifs, c’est l’incertitude associée à ces renforcements. C’est similaire au fonctionnement des machines à sous dans les casinos. Vous ne savez jamais quand vous allez gagner, mais la possibilité que cela se produise vous incite à continuer à jouer.
De la même manière, vous ne savez jamais quand vous allez recevoir un « like » ou un commentaire, ce qui vous incite à vérifier constamment en vous connectant sur la plateforme (le temps d’écran).

L’incertitude renforce le comportement de vérification. Si nous savions exactement quand nous recevrions une validation sociale, nous ne vérifierions l’application que dans ces moments-là. Mais parce que c’est imprévisible, nous vérifions constamment, dans l’espoir d’obtenir cette validation.

De plus, les concepteurs de plateformes de médias sociaux sont conscients de ces mécanismes et les utilisent pour augmenter l’engagement des utilisateurs. Par exemple, en retardant parfois les notifications ou en les regroupant, ils créent une anticipation et une incertitude qui incitent les utilisateurs à revenir sur la plateforme pour vérifier.

En résumé, l’incertitude joue un rôle clé dans le comportement répétitif de vérification et d’engagement sur les plateformes de médias sociaux, car elle exploite nos mécanismes neurobiologiques et psychologiques de recherche de récompense.

Les travaux de B.F. Skinner, on vérifié cette condition (Renforcement à intervalle variable (VI). avec le programme expérimentale introduisant la variable Renforcement à intervalle variable (VI) : Le renforcement est délivré pour le premier comportement après un intervalle de temps variable. Par exemple, un animal pourrait recevoir une friandise en moyenne toutes les 10 minutes, mais parfois après 5 minutes, parfois après 15 minutes, etc…
C’est ce programme qui est le plus proche de l’incertitude, car l’animal ne sait jamais exactement quand le renforcement arrivera.

Dans le contexte des réseaux sociaux, l’incertitude liée à la réception d’un « like » ou d’une notification peut être comparée à un programme de renforcement à intervalle variable.

Vous ne savez jamais exactement quand vous recevrez une validation sociale, ce qui vous incite à vérifier constamment en vous connectant !

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Stéphane Meurisse

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Stéphane Meurisse